Au milieu du XIXe siècle, en l’an 1853, au mois de juillet, Anna, une jeune femme, se languit de l’hiver. Parce qu’en hiver les jours sont plus courts et que personne ne la voit s’échapper par la petite porte dès la nuit est tombée.
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Paris
Je vais parfois dîner chez elle, tout en haut d'un immeuble haussmanien du neuvième arrondissement, dans le Paris des larges avenues mais dans une rue étroite à sens unique et pavées de menus pavés d'un gris presque noir. Le digicode ouvre un passage dans l'ancienne porte cochère monumentale…
C'est le temps des derniers. La dernière semaine, la dernière fois qu'on sera allé à la piscine, le dernier repas entre amis, le dernier jour, la dernière fois qu'on utilisera les bodyboards, la dernière soirée, la dernière photo, la dernière nuit, le dernier sms, le dernier au revoir.
Le billet d'avion acheté il y a un an servira pour de bon. Le visa s'arrête dans moins de deux jours.
Les 24 et 25 novembre au soir, j’ai fait une performance à l’Institut du monde arabe (IMA) à Paris dans le cadre de la carte blanche à Oxmo Puccino.
La performance ?
Écrire des portraits imaginaires et instantanés du public à partir d’un ou plusieurs mots puis, sans le corriger, lire le portrait à voix haute et l’offrir.
En 7 à 8 heures sur 2 soirées, j’ai écrit 48 portraits pour environ 75 personnes, tous partis avec leurs destinataires.
Chacun de ces portraits a été écrit en cinq minutes à peu près. Sans relecture. Sans pensée. Et c’est cela que je voulais vous raconter…
Tout a commencé à Paris, dans un immeuble hausmannien coincé entre le Luxembourg et le Panthéon, à deux pas de la Sorbonne, au coeur du quartier germanopratin. J'avais 20 ans, je ne connaissais rien à la capitale, à la littérature, à la vie, bien plus à l'amour et aux voyages. Elle m'a tendu un livre: lis-le, elle a dit. C'était le Marin de Gibraltar.
Un arrière-grand-oncle a quitté le continent pour un autre; au pied du bateau, dans le port: ses rêves exaucés. Il a sûrement été là-bas un homme qu'il n'avait pas pu - ou su - être ici.
Ces mots, ce sont mes larmes à moi.
Depuis le pont déjà je l'ai vu. Il aurait été difficile de ne pas le voir je dois dire, ce point rouge, cette tache de couleur vive sur le gris plat des routes et des ponts et des immeubles et du ciel de ce jour-là, le 14 septembre 2015.
Je donne la date mais elle n'a pas d'importance autre que de poser la scène, que de vous aider à mieux la voir, cette tache rouge dans la grisaille d'un après-midi d'orage entrecoupé d'éclaircies.